L'enfant d'Oradour - Régis Delpeuch

Jeunesse – L’enfant d’Oradour – Régis Delpeuch

L'enfant d'Oradour - Régis Delpeuch

L’enfant d’Oradour est un roman de Régis Delpeuch paru chez Scrineo le 16 mai 2019. Il met en lumière l’histoire vraie de Roger, l’enfant rescapé du massacre d’Oradour sur Glane. Quand la réalité est plus incroyable que la fiction…

Résumé :

« Mais je ne suis pas un héros. Je n’ai pas choisi d’être le gosse orphelin de Charly ni le petit rouquin rescapé d’Oradour-sur-Glane, comme on m’appelait là-bas ! Je préférerais que personne ne me connaisse ni à Limoges ni ici mais que mes parents, mes sœurs et mon petit frère soient encore vivants.
Depuis un an, je pense à eux tous les jours, tout le temps. Et tu sais pourquoi ? Parce que je ne veux pas oublier tous les bons moments avant ce maudit samedi. »

Originaires de Moselle, Roger et sa famille ont été contraints de fuir leur région et de se réfugier à Oradour-sur-Glane où ils mènent une vie heureuse. Jusqu’au 10 juin 1944, jour où des soldats nazis allemands encerclent le village.

Avis :

Il y a quelques années, j’ai visité le village d’Oradour sur Glane. J’ai été très marquée par l’ambiance, très oppressante, des lieux. Ils sont comme chargés de l’horreur de cette journée du 10 juin 1944. Bizarrement, si j’ai vécu cette visite de manière très forte sur le moment, j’ai occulté une partie des informations sur le déroulement de cette journée, notamment ce qui concerne les enfants de l’école. Je n’ai aucun souvenir de la mention de cette centaine d’enfants, ni de ce seul rescapé. Autant je me souviens parfaitement de l’église et des événements liés, et d’avoir été obligée d’en sortir rapidement tellement je m’y sentait mal, autant je ne visualise même plus l’école, alors que je sais avoir fait le tour du village… Vous comprendrez que le sujet du roman de Régis Delpeuch ait attisé ma curiosité.

L’école enfantine et des lorrains ©Dennis Nilsson

Avant de rentrer dans le livre, un mot sur la couverture signée Antoine Brivet (illustrateur entre autres de La toute petite librairie d’Adeline Ruel chez Gulf Stream – ma chronique), qui pourrait laisser penser que Roger assiste à l’incendie de l’église, or à aucun moment il n’est directement visuellement témoin du massacre. C’est cependant une très jolie couverture, où j’apprécie particulièrement, une fois de plus, le travail de la lumière que réalise Antoine Brivet. Il met en valeur les cheveux roux de Roger, qui rappellent la couleur des flammes qui semblent l’éclairer de derrière. J’aurais sans doute préféré voir l’enfant dos à la scène, ce qui aurait été plus représentatif de l’histoire.

Dans le communiqué de presse, l’auteur répond à 3 questions sur son roman, j’ai trouvé intéressant de vous partager ses réponses, pour mieux comprendre pourquoi il a écrit ce livre, mais aussi pour rassurer les adultes sur la représentation de la violence dans ce roman destiné aux enfants à partir de 9 ans :

Pourquoi raconter le massacre d’Oradour ?
Parce que les dangers les plus extrêmes sont ceux que l’on occulte, ceux que l’on refuse d’affronter, croyant par-là qu’ils ne se reproduiront jamais.
Mais les enfants, à 9/10 ans, ne sont-ils pas trop jeunes pour lire ce roman ?
Non, car le drame d’Oradour montre à quel point la violence déchaînée de la guerre ignore l’innocence des enfants. Si nous voulons faire de nos enfants des citoyens responsables, si nous voulons les éveiller à une véritable culture de la paix, il faut leur faire prendre conscience très jeune que l’histoire s’emballe toujours plus vite qu’on ne le croit, et verse souvent dans l’abîme de la barbarie.
Dans l’ouvrage, le petit Roger assiste-t-il au massacre ?
Non, il s’enfuit dès que les Allemands demandent le rassemblement sur le champ de foire. Une fois loin du village, il apercevra la fumée s’élevant de l’église sans savoir de quoi il s’agit. Il ne vit pas les faits au moment où ils surviennent, mais ils lui seront rapportés par les amis de ses parents, de manière neutre, pour ne pas choquer les lecteurs.

Effectivement, si le parcours de Roger est difficile, si il souffre, on ne voit jamais directement le massacre. Il y a certes des scènes violentes, mais pas plus que ce que tout enfant peut voir à la télévision ou sur internet quotidiennement. De plus, on a ici la distance du récit, et l’aide d’un cahier documentaire à la fin de l’ouvrage, qui contextualise les événements racontés. C’est cependant une lecture qui nécessite, je pense, un accompagnement et une discussion.

Quand on lit l’histoire de Roger, on se dit qu’il n’a vraiment pas eu de chance. Déporté de Moselle jusqu’au village d’Oradour avec sa famille, il se trouve au mauvais endroit au mauvais moment. Mais il s’en est sorti ce jour là parce que son père lui avait appris à se méfier des allemands. D’une manière générale, l’auteur a choisi dans son adaptation des événements de mettre en avant l’importance de l’éducation reçue, et de nous montrer comment la famille de Roger est restée soudée face aux événements. Je pense notamment au papa de Roger qui lui raconte au tout début que le sac que le petit (il a 4 ans en 1940) doit porter contient du chocolat pour le motiver… ou de son oncle qui lui promet un cheval de bois la prochaine fois qu’ils se verront pour le consoler de devoir laisser ses jouets en bois derrière lui en quittant la Moselle.

Ce qui ressort de ce roman, c’est tout l’amour d’une famille. Comment les exilés de Charly ont su rester unis grâce à leurs parents, comment les enfants de la famille ont pu vivre une vie « normale » jusqu’à ce 10 juin, et comment le petit Roger a survécu, se fiant à son instinct et aux conseils de son père, malgré le refus de ses sœurs de le suivre… Bien évidemment, on découvre dans ce livre des événements terribles, horribles, innommables, mais on rencontre surtout une famille avec des valeurs, et un enfant qui, porté par ces valeurs, a réussi à survivre au cauchemar. C’est cette histoire, cette famille, qui rendent l’indicible acceptable lors de la lecture.

Le dossier qui suit le roman est très bien fait, et explique vraiment bien comment les choses se sont déroulées ce 10 juin 1944, et essaie de dire pourquoi. Il raconte aussi la suite, après-guerre, le procès, et plus récemment le Centre de la mémoire d’Oradour. Il nous dit enfin ce qu’est devenu Roger, nous donnant un aperçu de sa vie « après ». Le tout avec un vocabulaire simple, parfaitement adapté à l’âge des lecteurs cibles.

Ce petit ouvrage est un concentré d’émotion, le style de l’auteur est très visuel, et permet de bien se représenter les lieux et les personnages. C’est un livre à lire, à faire lire, à partager. Un livre pour ouvrir la discussion, pour que, dans le futur, nos enfants devenus adultes ne reproduisent jamais de tels actes de barbarie. Et quand on regarde ce qui se passe dans le monde actuellement, on se dit qu’il y a urgence à éduquer les plus jeunes au respect et à la paix, tout simplement.

📖 découvrir un extrait

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J’ai reçu la version papier de ce livre dans le cadre de ma participation au Club des lecteurs Scrineo pour l’année 2019. Merci à eux pour la confiance.

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