Asking for it – Louise O’Neill

Asking for it est le deuxième roman de Louise O’Neill, une jeune autrice irlandaise. Il a été publié pour la première fois en 2015, et en 2016 chez Quercus Books pour la présente édition, qui comprend en plus du texte des pistes de réflexion pour clubs de lecture. A ce jour, il n’a pas été traduit en français, ce qui est très dommage je trouve pour un sujet d’actualité si fort. Et nécessaire.

Résumé :

It’s the beginning of the summer in a small town in Ireland. Emma O’Donovan is eighteen years old, beautiful, happy, confident. One night, there’s a party. Everyone is there. All eyes are on Emma. The next morning, she wakes on the front porch of her house. She can’t remember what happened, she doesn’t know how she got there. She doesn’t know why she’s in pain. But everyone else does. Photographs taken at the party show, in explicit detail, what happened to Emma that night. But sometimes people don’t want to believe what is right in front of them, especially when the truth concerns the town’s heroes…

C’est le début de l’été dans une petite ville irlandaise. Emma O’Donovan a 18 ans, elle est belle, heureuse et a confiance en elle. Un soir, elle se rend à une fête. Tout le monde est là. Tous les yeux sont tournés vers elle. Le lendemain matin, elle se réveille sur le pas de la porte de sa maison. Elle ne se souvient pas ce qui s’est passé, ni comment elle a atterri là. Tout ce qu’elle sait, c’est qu’elle se sent mal. Mais les autres aussi. Les photos prises lors de la soirée montrent, avec force détails, ce qui est arrivé à Emma cette nuit là. Mais parfois, les gens refusent de voir ce qui est devant leurs yeux, tout spécialement quand la vérité met en cause un héros local… (traduction effectuée par mes soins, désolée si elle comprend des approximations).

Avis :

J’ai eu besoin d’un temps de digestion, d’assimilation, une fois refermé mon livre. J’étais à la fois triste, en colère, très perturbée par la conclusion. Il m’a fallu quelques jours pour me sentir enfin capable, ou presque, de vous donner mon avis.

Avant de commencer, je me dois de vous prévenir que ce roman aborde des sujets très lourds : le viol, le slutshaming, la non reconnaissance des agressions, le harcèlement, le suicide, la dépression…

Après un tel étalage d’horreurs, vous comprendrez que ce livre ne s’adresse pas aux plus jeunes, même s’il aborde des thèmes qu’on devrait rencontrer plus souvent en littérature comme ailleurs. L’autrice a le courage dans son livre d’aller au front, et pas en prenant les chemins les plus faciles.

Elle met en effet en scène Emma, une jeune femme qui a tout pour qu’on la déteste : belle, arrogante, séduisante, elle se sert des autres sans vergogne. Mais se plier aux diktats de la société qui veut qu’une femme soit séduisante et séductrice autorise-t-il les hommes à se comporter comme des bêtes ? (Et encore, je m’excuse ici auprès des animaux pour la comparaison). C’est toute la question posée par ce roman. Question qui résonne de manière terrible avec l’actualité, et les #metoo et autres #balancetonporc. Quelle femme ne se reconnaîtra pas dans au moins une partie de cette histoire ? Quel homme aussi, agresseur ou agressé. Nous sommes tous concernés.

La force de Lousie O’Neill est justement ce choix, un personnage que l’on déteste facilement est-il pour autant condamnable de se faire agresser ? Est-il normal qu’une victime se retrouve considérée comme bourreau ? Après tout, elle ne demandait que ça (asking for it) d’après les garçons mis en cause… Une femme sexy est donc forcément une femme en demande de rapport sexuel ?

J’ai donc lu ce livre en VO anglaise, puisqu’il n’est pas traduit. Le niveau me paraît assez abordable, niveau lycée je dirais. Et c’est d’ailleurs à cette période de la vie qu’il est important de lire un tel livre. De comprendre que si vous ne vouliez pas une relation quelle qu’elle soit, c’est au bas mot une agression sexuelle, voire un viol. Et qu’il ne faut pas rester avec ça sur le cœur. Aussi dur que ça soit, il faut en parler. Trop de femmes se sont tues et ont vu leur vie brisée par le traumatisme. Plus nous serons nombreuses à parler, plus notre voix portera, et plus les mentalités évolueront. Il y a encore trop peu de gendarmes et policiers formés à recevoir la parole des victimes. Il fat que ça change. A nous, femmes, mais aussi hommes et tout être humain, de faire bouger les choses.

J’espère de tout cœur que ce livre sera traduit en français très prochainement, comme vient de l’être il me semble Only ever yours, le premier roman de l’autrice, car c’est un livre d’utilité publique.

C’est un roman fort, coup de poing, mais nécessaire.